Les bénéficiaires sont tellement rendus blasés…

Les bénéficiaires sont tellement rendus blasés dans les résidences, les foyers d’accueil, les îlots résidentiels, dans les endroits où ils peuvent vivre, manger, c*ier et parfois rire un peu. Ils sont tellement rendus blasés que les autorités ne les écoutent pas, que les administrateurs ne se soucient pas sincèrement de leur qualité de vie.

Quand tu dis qu’après plusieurs années, les plaintes ne rentrent plus à la coordination par manque de confiance. L’administration se dit alors que tout va bien et la confiance en cette coordination demeure, à tord. Mais le conseil sait très bien qu’il y a quelque chose qui ne tourne pas rond. Il y a des personnes qui quittent, des personnes qui se font expulser, des personnes qui pensent mettre fin à leur vie par une grande tragédie, des personnes qui se laissent mourir de malheur et des personnes à qui ont a volontairement supprimé leur dignité, pour se laisser mourir dans un Sanatorium.

Il y a d’autres personnes qui se battent pour changer cette situation et on les rabaisse continuellement, on laisse l’intimidation infiltrer le tissu mince de la raison. Et sans sanctions, l’indiscipline prône pour de bon. C’est comme si le résident était en train de se noyer dans un lac éloigné, et que la direction attendait patiemment que la personne cesse de se débattre et qu’elle disparaisse de la surface agitée. Comme s’il n’y avait aucune autre façon de l’aider, qu’en la regardant se noyer. « On ne peut rien faire pour aider cette personne là. Il n’y a personne pour aider. Aucune ressource pour rien régler. »

Bref, les énergies ne sont pas mises à la bonne place. Ça devient vraiment, mais vraiment démoralisant pour cette petite partie de la population, cette autre minorité presque visible. On entendra dire : « Une autre couche de la société souillée qui se plaints ! » Mais quand tu le vis et que tu l’as dans le sang et que tu as de la misère, j’peux tu te dire qu’il y en a des soirs de déprime, des semaines de détresse incomprise, des idées suicidaires et incendiaires qui meublent en grande partie l’imaginaire ! C’est parce qu’il se passe de quoi là ! C’est pas que le monde hallucine, où qu’ils s’inventent des histoires où Freddy, à côté de certaines intervenantes, serait cool et sympathique. C’est un phénomène de société qui touche un trop petit nombre de personne, pour que l’oreille aux Communes tende son appareil gouvernemental.

La trop grande partie de la population s’en fout parce que des histoires de minorité on en entend à tous les jours depuis la fin des années 70. Des demandes d’aide, des dénonciations sur la voie publique, des gens qui crient « On a des droits ! On a des droits ! » Mais là ça fait plus de 30 ans que l’histoire se répète. L’auditoire est tanné, brûlé, ils ne veulent plus rien entendre de ça.

Les scandales on les entend à la télé, à la radio, ça fait une onde choc mais ensuite on fait quoi des pots cassés ? Qu’en est-il du suivi ? Les gens qui vivent des drames au quotidien ne se sentent plus à l’aise avec la dénonciation. Ça ne leur donne pas le goût de combattre le malheur qui les afflige. Et en ne portant jamais plainte, la spirale continue vivement d’étourdir, jusqu’à ce qu’un jour de détresse criante, le docteur choisisse, en vain, de prescrire.

Le pire dans tout ça c’est que les résidents finissent souvent par se dire : « Je pense que je suis malheureux. C’est peut-être ça ma destinée. C’est peut-être ça qui m’attend jusqu’à ce que je ne respire plus, jusqu’à ce que je ne puisse plus être considéré comme un danger de micro société. On m’a enlevé tout espoir, toute envie d’y croire. Et qu’est-ce que ça va leur donner ; 2 semaines de plus dans le sud par année… Je suis rendu une banalité, un dégout de la société, une dégueulasserie loin des priorités, sous des conventions tant adulées, tant respectées. » Il y a des gens qui ont tout abandonné, qui ont tout laissé tomber, qui ont perdu la joie de vivre en se laissant mourir à cause de leur qualité de vie tellement médiocre.

On se bat un coup de crayon, contre un syndicat qui se défend à coups de millions. Je méprise viscéralement toute attitude, tout comportement pro syndical qui affecte négativement ma vie, ainsi que celle des miens. Pour eux, c’est 35-40 heures/semaine. Pour nous, c’est 168 heures/semaine. Je crois que l’emphase n’est pas mise sur les conditions de vie des bonnes personnes. Les gouvernements laissent la loi du désespoir régner et ils ne réalisent pas que le goût de vivre des bénéficiaires, fond au rythme des conventions.

Il n’est pas toujours facile de se mobiliser, de se regrouper, de convaincre les gens de se battre pour leur cause. Si seulement nous pouvions entrer en contact avec toutes les personnes vivant dans les foyers d’accueil, les résidences de groupe et tout ceux habitent dans les CHSLD du Québec, et exigez 2% de leurs maigres revenus, mettre ça dans un pot. Ensuite, embaucher des avocats, des relationnistes, des lobbyistes et du personnel administratif et on se forme un méga syndicat. Là, et seulement là, il sera possible de nous battre, de nous défendre convenablement.

En attendant, des organismes para gouvernementaux avec des dents de porcelaines recommandent, émettent des rapports, suggèrent volontairement aux diverses directions de d’autres établissements para gouvernementaux de corriger certaines situations. Mais concrètement, il ne semble pas qu’il y est de lois, des règlements qui forcent de conseil d’administration à garantir le bien-être et la sécurité des bénéficiaires. Comment voulez-vous arriver à des résultats positifs lorsque la haute direction et le même financement proviennent du même cabinet, du même portefeuille ? C’est comme si le département de la sécurité de l’hôpital demandait au chirurgien de changer sa façon d’opérer… Ça n’aurait aucun sens. Par contre, si votre avocat mettait en demeure votre chirurgien lui sommant de modifier sa façon de vous opérer sinon des actions judiciaires seraient entreprises. Ça n’aurait pas le même impact. Mais chose certaine, sans ressources financières, il est difficile de se battre.